BURUNDI:ORIGINE ET NATURE DU CONFLIT ENTRE HUTU ET TUTSI AU BURUNDI.

22/01/2012 16:42

Le présent article vise à réfuter un certain nombre d’idées reçues sur la nature du conflit burundais.

D’aucuns présentent le conflit burundais comme un phénomène endogène, un conflit atavique entre deux ethnies (dont l’une aurait vécu jadis dans le servage et qui aujourd’hui serait victime et objet de toutes les exclusions) et qui se vouent une haine mutuelle et implacable.

Mon propos est de démontrer par des faits historiques vérifiables que le conflit burundais est de nature néocoloniale à l’instar des guerres civiles qui ont déchiré bon nombre de pays anciennement colonisés par les Etats européens et qui y ont été allumées par ces mêmes Etats avant leur retrait.

C’est dire que la crise burundaise est la résultante et le produit de facteurs exogènes dont hutu et tutsi sont tous ensemble des victimes.

Bien plus, contrairement à ce qui est souvent affirmé le conflit burundais n’est pas un avatar de la colonisation mais plutôt un avatar de la décolonisation.

Deux donnes, l’une géographique l’autre historique ont déterminé l’éclatement de la crise burundaise au moment précis où il est survenu c’est-à-dire entre 1962 et 1965.

La donne géographique est la situation du Burundi à proximité d’un grand pays comme le Congo Démocratique doté d’énormes minerais de gisements stratégiques (comme le cobalt).

Rappelons que le cobalt extrait du sous sol congolais constituait la seule et unique matière première de base servant à la fabrication des pièces de rechange pour les avions de combats des pays membres de l’OTAN.

Alors que l’Union Soviétique regorgeait de cobalt dans son sous sol, les pays membres de l’OTAN y compris les Etats Unis d’Amérique en étaient totalement dépourvus dans leur sous sol et ne comptaient que sur le cobalt congolais.

C’est pour cela que pour les pays membres de l’OTAN l’accessibilité permanente au cobalt congolais était une question de vie ou de mort.

La donne historique est la situation de guerre froide qui prévalait à l’indépendance du Burundi.

Dans le cas où l’Union Soviétique et/ou la Chine Communiste parvenaient d’une manière ou d’une autre à se rendre maître du Congo Démocratique et à rendre de manière durable le cobalt congolais inaccessible aux pays de l’OTAN, ils pouvaient gagner militairement la guerre froide.

En effet privés de cobalt congolais, les avions de combat des pays membres de l’OTAN resteraient cloués au sol et seraient totalement détruits en cas d’attaque par l’aviation soviétique exactement comme l’aviation égyptienne a été décimée au sol pendant la guerre de juin 1967. (Ce qui vient d’être dit du cobalt congolais est valable dans une moindre mesure de l’uranium congolais).

Ce scénario catastrophe mais hautement probable et réalisable a constitué tout au long de la guerre froide un casse-tête et une véritable obsession pour les stratèges militaires de l’OTAN.

Empêcher que ce scénario ne se matérialise en éloignant du Congo Démocratique et de sa proximité tout danger communiste a donc constitué un impératif stratégique majeur.

Pour la réalisation de cet objectif les pays membres de l’OTAN se sont répartis la tâche :

- La France fut chargée de maintenir fermement dans sa zone d’influence et d’y combattre toute velléité nationaliste les deux pays francophones frontaliers du Congo Démocratique à savoir la République Centrafricaine et le Congo Brazzaville ;

- Le Portugal reçut la même mission en Angola dont il refusa l’indépendance et où il soumit les mouvements de libération à une répression sauvage avec l’appui tacite des pays occidentaux ;

- L’Angleterre fut chargée de maintenir son emprise sur l’actuelle Zambie appelée à l’époque Rhodésie du Nord en retardant son accession à l’indépendance jusqu’à 1964 ;

- La tâche de combattre le nationalisme au Congo Démocratique, au Burundi et au Rwanda fut confiée aux Belges et aux Américains.

Cette tâche relativement aisée lorsque le Congo, le Burundi et le Rwanda restaient des colonies ou territoires sous tutelle Belge, devenait plus difficile lorsque le contexte historique de l’époque rendit inévitable l’accession de ces trois pays à l’indépendance.

Or cette décolonisation des trois anciennes possessions belge en Afrique Centrale intervenait au plus fort de la guerre froide, au paroxysme de la compétition idéologique et militaire entre le camp communiste et le camp capitaliste.

Les stratèges de l’OTAN, au premier rang desquels se trouvaient les Américains et les Belges devaient concilier trois exigences :

Première exigence : accorder une indépendance nominale et théorique au Congo, au Burundi et au Rwanda.

Deuxième exigence : garder les trois pays dans la zone d’influence du camp occidental.

Troisième exigence : empêcher que les trois pays ou l’un d’entre eux ne bascule dans le camp soviétique ou chinois et assurer de la sorte aux pays de l’OTAN l’accessibilité permanente au cobalt du Congo Démocratique.

Il devenait donc impérieux d’éloigner du Congo Démocratique le danger communiste et d’établir autour de cet immense pays un cordon sanitaire et une zone politiquement sûre qui le protégerait du fléau communiste.

L’actualité récente et immédiate met en évidence la place stratégique que jouent le Burundi et le Rwanda dans le maintien de l’unité et de l’ordre public au Congo Démocratique ou dans la déstabilisation de ce pays. Le régime Mobutu a été balayé à partir de ces deux pays et le régime Kabila a été ébranlé à partir du Rwanda et du Burundi.

Pour les stratèges de l’OTAN un obstacle de taille rendait difficile la réalisation de cet objectif ; cet obstacle était le nationalisme congolais représenté par le MNC de Patrice Lumumba, le nationalisme rwandais représenté par l’UNAR, le nationalisme burundais représenté par l’UPRONA du Prince Rwagasore.

Combattre ces trois nationalismes devenait donc un objectif stratégique majeur.

Mais pourquoi donc le nationalisme de nos trois pays était-il préjudiciable aux intérêts des membres de l’OTAN ?

D’abord les nationalistes africains en général et ceux de nos trois pays en particulier recevaient un actif soutien diplomatique et parfois matériel des pays communistes ; ensuite parce que les nationalistes de nos trois pays refusaient aux occidentaux l’extension et la consolidation de leur zone d’influence dans notre sous région et par ricochet rendaient impossible l’accessibilité permanente au cobalt congolais aux stratèges militaires de l’OTAN, ce qui dans le contexte de la guerre froide constituait un danger mortel.

Aux yeux des Occidentaux donc les nationalistes des trois pays étaient les alliés naturels et objectifs des régimes communistes.

Combattre le nationalisme congolais, le nationalisme rwandais et le nationalisme burundais devenait pour les pays occidentaux (en particulier les USA et la Belgique) un impératif stratégique majeur.

Au Congo Démocratique, le nationalisme fut rapidement vaincu lorsque le 17 janvier 1961 Patrice Lumumba fut assassiné par la CIA parce qu’il avait amorcé un spectaculaire rapprochement avec l’Union Soviétique et qu’il avait ouvert son pays à l’influence communiste rendant ainsi impossible aux pays de l’OTAN l’accès au cobalt congolais.

Au Rwanda, le nationalisme (qui pour des raisons propres à l’histoire de ce pays était monoethnique et tutsi) fut également vite abattu lorsqu’en 1959-1960 la Belgique alluma dans ce pays une guerre civile, tribale et génocidaire qui décima des milliers de nationalistes de l’UNAR et envoya les autres dans un long exil dans les pays voisins et notamment au Burundi.

Les nationalistes rwandais de l’UNAR avaient eu l’inexcusable tort d’accepter l’appui financier de Moscou et de Pékin.

Au Congo Démocratique les Américains installèrent des régimes fantoches et pro-occidentaux (à la place des nationalistes de souche lumumbiste) représentés par Cyrille Adoula, Joseph Iléo, Moïse Tchombé, Joseph Kasavubu et Joseph-Désiré Mobutu.

Au Rwanda, les Belges installèrent à la place des nationalistes de l’UNAR un régime pro-occidental, fantoche, tribaliste et sanguinaire représenté par Grégoire Kayibanda.

Seul le nationalisme burundais continuait à représenter pour les occidentaux un défi, un obstacle et une menace à leurs intérêts stratégiques.

Combattre le nationalisme burundais devenait urgent lorsque dans les années 62 et 63 les nationalistes congolais de souche lumumbiste et les nationalistes rwandais tous chassés de leurs pays par les stratèges occidentaux reçurent des nationalistes burundais (hutu et tutsi) asile politique, appui diplomatique et matériel et furent autorisés à lancer des attaques militaires sur le Congo et le Rwanda à partir du sol burundais.

Cela devint encore plus urgent lorsque au cours de l’année 1964 la Chine Communiste choisit le Burundi comme point d’appui et point de départ pour déstabiliser le Congo Démocratique et balayer de ce pays l’influence américaine en se basant sur le principe énoncé par Mao Tsé Toung qui disait : « qui conquiert le Congo Démocratique conquiert l’Afrique et qui conquiert le Burundi conquiert le Congo Démocratique » cela devenait encore plus urgent lorsqu’à la même période les nationalistes burundais autorisèrent le révolutionnaire argentino-cubain Ernesto Che-Guevara à passer par le territoire burundais pour aller aider les maquisards congolais à chasser les Occidentaux et leurs alliés du Congo Démocratique.

Cela devenait plus urgent lorsque des rebelles nationalistes congolais de souche lumumbiste partis du Burundi avec l’aide des Chinois et du Gouvernement Ngendandumwe s’emparèrent des villes d’Uvira, de Bukavu et de Kisangani dont ils ne furent délogés que par des parachutistes belges et américains. C’était en octobre 1964.

Il devenait donc un impératif stratégique majeur de briser le nationalisme burundais allié aux nationalistes congolais et rwandais et par ricochet aux régimes communistes : Belges et Américains vont s’y employer.

La tâche ne fut pas facile car contrairement au nationalisme rwandais qui était monoethnique et tutsi, le nationalisme burundais comptait en son sein des hutu et des tutsi (avec d’ailleurs plus de hutu que de tutsi) et des leaders hutu comme Pierre Ngendandumwe et Paul Mirerekano étant d’ardents nationalistes très nettement anti-occidentaux.

Le nationalisme burundais étant profondément ancré dans la conscience collective sa destruction sera pour les Américains et les Belges une tâche ardue dont la réalisation nécessitera plusieurs années.

Pour les stratèges Américains et Belges la meilleure façon de détruire le nationalisme burundais était de détruire la nation burundaise et de saper l’Etat-Nation burundais plusieurs fois séculaire. C’est à cela qu’ils vont s’atteler (à partir de l’année 1962).

Comment ont-ils procédé ?

- En assassinat le Prince Rwagasore le garant le plus solide de la continuité de l’Etat-Nation au Burundi.

- En liquidant physiquement et politiquement l’ethnie des Baganwa (après s’être appuyée sur elle) pour placer les hutu et les tutsi dans un face à face conflictuel semblable à celui qui prévalait au Rwanda.

- En poussant les hutu de l’UPRONA à abandonner la voie du nationalisme dans laquelle ils avaient cheminé du temps du Prince Rwagasore pour s’engager sur le chemin du tribalisme et du génocide contre les tutsi.

- En assassinant le Premier Ministre Pierre Ngendandumwe.

- En allumant des guerres tribales générant le cycle infernales massacres -vengeance-répression – qui allaient creuser un énorme fossé de haine entre hutu et tutsi.

- En persuadant les hutu de l’UPRONA que les tutsi étaient des envahisseurs étrangers que les hutu avaient le droit de chasser du Burundi et/ou de les exterminer.

- En poussant les hutu de l’UPRONA à s’allier avec les hutu du Rwanda, avec les hutu du Burundi affiliés aux partis politiques tribales opposés à l’UPRONA tel le P.P., avec les congolais fantoches et pro-occidentaux.

Pour réaliser tout ce programme, les stratèges Belges et Américains vont s’appuyer sur un certain nombre d’institutions, d’associations et de personnalités aussi bien burundaises qu’étrangères.

Citons : l’Association des Colons du Rwanda-Urundi, le Syndicat Chrétien Belge, les Services de Sécurité Rwandaise, les Prêtres de la Congrégation des Pères Blancs oeuvrant au Burundi, les Religieux des différentes Eglises Protestantes et Adventistes travaillant au Burundi, le personnel des Ambassades de Belgique et des Etats-Unis d’Amérique, le personnel politique d’ethnie hutu affiliés à différents partis y compris l’UPRONA, les prêtres hutu du Clergé catholique, les religieux hutu des différentes Eglises Protestantes et Adventistes, les Associations d’Etudiants hutu tel que l’ASSEBA (Association des
Etudiants Bahutu), le MIPROBA (Mouvement des Etudiants Bahutu), l’UBU, BAMPERE, les partis politiques à idéologie tribaliste et génocidaire tel que le PALIPEHUTU, le FRODEBU etc.

Seul l’utilisation de cette grille de lecture de l’histoire du Burundi permet d’appréhender correctement la véritable nature de la crise burundaise.

Présenter l’exclusion des hutu des sphères de l’Etat et de l’Armée comme la raison principale de l’éclatement de la crise burundaise c’est pratiquer l’imposture, la supercherie et la déformation des faits historiques. C’est prendre les effets pour les causes car lorsqu’a eu lieu le premier génocide des tutsi en octobre 1965 les hutu étaient fortement majoritaires à l’Armée, dans les hautes sphères de l’Etat, au Sénat et à l’Assemblée Nationale.

Si Burundi était situé géographiquement loin du Congo Démocratique et occupait par exemple l’emplacement actuel du Bénin, ou du Togo ou du Lesotho donc sans importance géostratégique, notre pays n’aurait jamais connu ni guerre civile ni génocide.

Si Burundi avait accédé à l’indépendance avant le déclenchement de la guerre froide, ou après la fin de cette guerre, il n’aurait jamais connu le génocide.

Si les élections législatives de septembre 1961 avaient été gagnées par des hommes de paille de la Belgique comme Ntidendereza ou Bigayimpunzi et non par Rwagasore, le Burundi n’aurait jamais connu le génocide.

Les différents événements qui, depuis 1962 jusqu’à nos jours, ont émaillé notre histoire de manière tragique sont la matérialisation et la réalisation de ce programme mis au point par les stratèges occidentaux.

Passons en revue les plus importants parmi ces événements :

1. Assassinat par la Jeunesse Nationaliste Rwagasore de quatre syndicalistes hutu à Kamenge le 14 janvier 1962.

Après avoir liquidé physiquement le Prince Louis Rwagasore, Harroy a voulu créer le chaos au Burundi et semer des troubles graves qui auraient fourni à la Belgique un prétexte pour retarder l’octroi de l’indépendance dans notre pays et y maintenir pour longtemps les troupes militaires belges.

Ce chaos lui aurait permis d’affaiblir et de détruire le nouvel Etat UPRONA et de permettre aux partis tribalistes hutu de prendre le pouvoir : le maintien des troupes militaires belges au Burundi, réclamé par la Belgique et refusé par le nouveau gouvernement UPRONA devait servir à cela pour créer ce chaos. Les syndicalistes hutu au service de Harroy et poussés par le Syndicat Chrétien Belge se sont livrés à des actes de provocation contre la Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore. Il s’en est suivi une bagarre qui a débouché sur la mort de quatre syndicalistes hutu.

2. Affaire Mirerekano.

L’affaire Mirerekano représente la plus grande réussite de la stratégie mise au point par les Américains et les Belges pour casser le Parti UPRONA, briser le nationalisme burundais en faisant basculer dans le camp des tribalistes les leaders hutu de l’UPRONA parmi les plus prestigieux et qui jusqu’à cette époque étaient des nationalistes flamboyants.

Pour ce faire ces stratèges ont profité des divisions apparues au sein de l’UPRONA dans la foulée de l’assassinat du Prince Rwagasore.

Paul Mirerekano frustré de n’avoir pas obtenu la présidence du parti UPRONA et refusant le poste du Ministre de l’Agriculture qui lui était offert a vite été récupéré par les tribalistes hutu et leurs soutiens occidentaux qui l’ont fait sombrer dans le crime et le génocide.

Les services de sécurité rwandais, le syndicat chrétien belge, les leaders hutu des partis politiques burundais opposés à l’UPRONA ont été mis à contribution pour obtenir cette tragique conversion de Paul Mirerekano.

A la même époque les stratèges occidentaux provoquaient une scission au sein de l’Eglise Anglicane (qui en 1961 avait voté UPRONA et s’était montré éminemment nationaliste) en poussant les religieux hutu comme Eustache Kinama à fonder une Eglise à eux (dénommée Eglise de Dieu du Burundi) qui s’est révélée un solide vecteur de diffusion de l’idéologie tribaliste et génocidaire.

Toujours à la même époque, en s’appuyant sur l’Eglise Adventiste du Rwanda les mêmes stratèges ont diffusé l’idéologie tribaliste et génocidaire parmi les hutu de la province Cibitoke dont nombreux parmi eux sont des Adventistes et qui jusqu’à cette époque étaient de grands nationalistes affiliés au parti UPRONA.

Le cas le plus connu et le plus emblématique est celui du député UPRONA de Cibitoke, hutu et adventiste Monsieur Siméon Kayabu.

Pendant ce temps, le Syndicat Chrétien Belge organisait les étudiants hutu fréquentant les universités belges, françaises et l’université du Burundi en une association tribaliste à idéologie génocidaire dénommée ASSEBA (Association des Etudiants Bahutu).

A parti de l’année 1963, s’est produit une synergie et une collusion entre Paul Mirerekano, les Adventistes hutu de la province Cibitoke, les Anglicans dissidents hutu de Bururi, Makamba et Rutana et les étudiants membres de l’ASSEBA.

Le génocide des tutsi d’août 1964 dans les provinces de Cibitoke et de Kayanza était l’œuvre commune de Paul Mirerekano et des Adventistes hutu de Cibitoke.

Le Coup d’Etat manqué d’août 1964 contre les institutions établies était l’œuvre commune de Paul Mirerekano et des étudiants membre des l’ASSEBA section Bujumbura.

La radicalisation et l’ethnisation de la conscience collective hutu en 1965 dans les provinces de Bururi, Makamba et Rutana a également résulté de la synergie entre Paul Mirerekano et les Protestants hutu du Sud dirigés par Eustache Kinama et Tite Bazahica.

A partir de l’année 1964, Mirerekano avec l’aide des Services de Sécurité Rwandais va mettre sur pied une milice hutu génocidaire dans les communes Bugarama et Busangana qui commettra dans les deux communes l’horrible génocide contre les tutsi d’octobre 1965.

3. Assassinat du Premier Ministre Pierre Ngendandumwe
La version la plus répandue dans les milieux hutu présente l’assassinat de Pierre Ngendandumwe comme un crime commandité par l’Ambassadeur de Chine au Burundi en poste début 1965 et par les extrémistes tutsi burundais, crime qui a été exécuté par les réfugiés tutsi rwandais, cela dans le cadre d’un vaste complot contre l’élite hutu.

Or rien de plus faux que cette version. L’assassinat de Pierre Ngendandumwe est l’œuvre de l’Ambassadeur américain en poste au Burundi à cette époque qui visait à punir le Premier Ministre Pierre Ngendandumwe pour avoir établi les relations diplomatiques entre le Burundi et la Chine, pour avoir autorisé l’ouverture le 1er janvier 1964, et l’arrivée au Burundi de l’Ambassadeur de Chine en avril 1964 (malgré l’opposition des pays occidentaux), pour le soutien qu’il avait accordé aux nationalistes congolais de souche lumumbiste qui attaquaient le Congo à partir du Burundi, pour avoir accordé aide et soutien aux nationalistes rwandais surnommés INYENZI, pour la guerre diplomatique et médiatique qu’il avait livré contre le régime hutu du Rwanda en dénonçant ses pratiques tribalistes et génocidaires.

L’assassinat de Pierre Ngendandumwe visait également à imposer à imposer pour son remplacement sur la scène politique burundaise des leaders extrémistes hutu comme Gervais Nyangoma plus acquis aux intérêts occidentaux et plus dociles.

En présentant l’Ambassadeur de Chine comme commanditaire de l’assassinat de Pierre Ngendandumwe, le diplomate américain visait à le combattre, à obtenir son expulsion du Burundi et à briser la poussée diplomatique de la Chine Communiste en Afrique Centrale avec comme objectif d’arracher le Congo Démocratique de la zone d’influence de l’OTAN pour la faire basculer dans le camp communiste. Il visait également à présenter les Chinois comme des ennemis des Hutu du Burundi qui n’avaient plus d’autres choix que de s’allier aux Occidentaux.

En présentant les extrémistes tutsi rwandais et burundais comme complices et auteurs de l’assassinat de Pierre Ngendandumwe le même diplomate américain cherchait à briser définitivement le nationalisme burundais en faisant des tutsi et des hutu des ennemis irréconciliables.

4. Le putsch militaire et génocidaire des tutsi d’octobre 1965
L’assassinat de Pierre Ngendandumwe avait préparé psychologiquement et politiquement le putsch militaire et le génocide des tutsi d’octobre1965.

Le putsch militaire et le génocide des tutsi qui l’a suivi a été planifié, préparé et financé par l’Ambassadeur Américain Donald Dumont. Le même diplomate, en liquidant physiquement un leader hutu modéré et nationaliste comme Pierre Ngendandumwe, cherchait à imposer sur la scène politique burundaise des leaders hutu extrémistes, radicaux et génocidaires comme Gervais Nyangoma.

Sur base de preuves matérielles de son implication dans le putsch et le génocide des tutsi d’octobre 1965 le Gouvernement du Burundi a expulsé et déclaré persona non gratta l’Ambassadeur Américain Donald Dumont, deux autres diplomates américains et un commerçant grec du nom de Paniyotides qui était leur agent.

De même le versement d’importantes sommes d’argent par le Syndicat Chrétien Belge pour financer le putsch a pu être matériellement vérifié.

Le putsch militaire visait à renverser les institutions légales, à installer une République Populaire des Bahutu tribaliste et sanguinaire et à exterminer toutes les populations d’ethnie tutsi. Les plus hautes personnalités d’ethnie hutu civiles et militaires ont participé à ce putsch et au génocide des tutsi. Toutes ces personnalités ont été régulièrement jugées par des Cours et Tribunaux légalement constitués ; elles ont été jugées et condamnées.

5. Le putsch militaire et génocidaire de septembre 1969
Il s’agissait d’une tentative de récidive du putsch et du génocide des tutsi d’octobre 1965 et dont les principaux organisateurs (les commandants Charles Karorero, Nicodème Katariho, Mathias Bazayuhundi) étaient d’anciens membres de l’ASSEBA (Association des Etudiants Bahutu).
Comme en 1965, le putsch impliquait les plus hautes personnalités de l’Etat (civiles, militaires et religieuses) toutes d’ethnie hutu qui visaient à renverser les institutions établies, proclamer une République Populaire des Bahutu et exterminer les populations d’ethnie tutsi.

L’implication matérielle dans ce putsch de l’Ambassadeur de Belgique le Général Henequiau a été prouvée, ce qui a amené le Gouvernement du Burundi à l’expulser.

Les coupables ont été régulièrement jugés et condamnés par les Cours et Tribunaux compétents et ont pu bénéficier d’une assistance judiciaire.

6. Le génocide des tutsi d’avril-mai 1972
Les organisateurs de ce génocide poursuivaient les mêmes objectifs politiques que ceux de 1965 et de 1969. Ils visaient à établir une République Populaire des Bahutu après avoir exterminé toutes les populations (vieillards, femmes, enfants, adultes) d’ethnie tutsi.

Cependant le génocide des tutsi d’avril-mai 1972 différait de ceux qui l’ont précédé par le haut degré de sophistication dans sa planification et dans sa préparation, par le nombre élevé des individus et associations aussi bien hutu qu’étrangères qui s’étaient impliqués dans ses préparatifs.

Le principal organisateur et financier du génocide des tutsi d’avril-mai 1972 fut l’Ambassadeur Américain en poste au Burundi à cette époque M. Thomas Melady.

Dans sa préparation des hutu de diverses catégories sociales furent fortement impliqués : officiers de l’Armée nationale, sous-officiers, hommes de troupe, membres du gouvernement, agents de l’Administration centrale et provinciale et communale, agronomes, enseignants, vétérinaires, juges de différents tribunaux, commerçants, élèves des écoles secondaires, étudiants à l’université et à l’Ecole Normale Supérieure, religieux et religieuses de l’Eglise Catholique et des Eglises Protestantes, religieux des Congrégations religieuses d’origine européenne.

La répression qui s’est exercée sur des hutu de la quasi-totalité des catégories sociales s’explique par leur forte implication dans la planification et les préparatifs du génocide des tutsi d’avril-mai 1972.

Malgré la sévérité de la répression marquée par de regrettables dérapages, cette répression n’a jamais pris la forme d’un génocide contre les hutu et dès que le Gouvernement Nyamoya a été mis sur pied il a rapidement mis fin aux débordements et aux dérapages.